L'euro a toujours été une mauvaise idée, le reste et le restera jusqu'au bout, car c'est une aberration économique accentuant les déséquilibres entre des économies nationales hétérogènes par nature. De plus, c'est une monnaie sans nation, ce qui n'a jamais fonctionné (car hors-sol). On essaie de nous pousser vers un fédéralisme européen qui irait jusqu'à intégrer la mutualisation des dettes, alors que c'était, jusqu'aux années Covid-19, formellement interdit par les traités.
Le but de cet entretien est d'expliquer en quoi le retour à une monnaie nationale serait bienvenu, et qu'il faut en finir, par ailleurs, avec l'idée ancestrale d'une monnaie forte comme soi-disant nécessité : une monnaie n'a pas à être forte ou faible, mais à se maintenir, comme les taux d'intérêt, à son niveau naturel, celui de la productivité intérieure. Le niveau d'une monnaie est un prix comme un autre ; à vouloir modifier un prix, il faut toujours s'attendre à un désastre, d'autant plus que la volonté de s'arrimer au deutschemark était artificielle.
Avant, quand les socialistes faisaient des erreurs (ce qu'ils font tout le temps), ils se heurtaient au mur de l'argent : la France chutait, les taux d'intérêt montaient et tout le monde s'en allait, mais il fallait que quelqu'un revienne mettre de l'ordre. Depuis l'euro, la classe politique française accumule les erreurs (comme la fermeture des centrales nucléaires, ou le fait que la production industrielle ne représente plus que 9 % de l'économie française). Il faut reprendre les bases de la monnaie (intermédiaire d'échange, réserve de valeur et unité de stock), et rappeler à quoi servent les taux de change et les taux d'intérêt.
La monnaie, c'est un prix. Concernant les taux de change, ce prix qu'est la monnaie doit s'exercer dans la géographie, pour correspondre aux flux des capitaux et aux atouts de la France tels que perçus par les étrangers ainsi que par les Français eux-mêmes. Concernant les taux d'intérêt, la monnaie doit s'exercer dans le temps, les taux d'intérêt servant précisément à mesurer le risque du temps. Un euro que l'on doit toucher dans dix ans n'a pas la même valeur qu'un euro d'aujourd'hui : si les taux d'intérêt sont à 7 et que l'on met 0,50 euro aujourd'hui, on touchera 1 euro dans dix ans. Un euro à percevoir dans dix ans vaut donc la moitié d'un euro d'aujourd'hui.
C'est ce que l'on appelle mesurer le risque du temps, notion importante pour le capitalisme car permettant, dans le cas d'un emprunt, de faire des calculs pour savoir quand les recettes escomptées, à l'horizon des dix prochaines années, vont être supérieures aux taux d'intérêt que l'on va devoir payer. C'est une façon de mesurer les comptes, entre le cash-flow que l'on va recevoir et celui que l'on va devoir payer. D'où le non-sens des taux négatifs de Mario Draghi à l'époque de leur mise en place : les taux d'intérêt servant à compenser l'incertitude du futur, des taux d'intérêt négatifs reviennent à dire que le futur serait plus certain que le présent.
Les taux d'intérêt négatifs, qui concernent globalement la période allant de 2012 à 2020, ont mis à mal toute notre économie, empêchant les compagnies d'assurances et les banques de travailler, le cours de ces dernières étant passé de 700 à 100, obligeant les actionnaires des banques à payer un maximum. Les politiques se croient plus malins que le marché mais, en essayant de contrôler les taux de change et les taux d'intérêt, ne font que déformer le système économique. L'économie espagnole et l'économie allemande n'ayant pas la même force, il est logique que ces pays aient des monnaies différentes pour montrer leurs différences économiques. Aligner deux pays sur la même monnaie crée une relation de dépendance inutile et nuisible, obligeant toujours les uns à payer pour les autres.
La production industrielle en France, passée de 24 % à 9 %, s'est effondrée. Nous avons toujours des entreprises industrielles françaises performantes, mais elles ne produisent plus localement. Par exemple, Air Liquide a des usines partout sauf en France : dans le cas contraire, Air Liquide ne gagnerait pas d'argent en France, à cause des manipulations politiques des taux de change et des taux d'intérêt. Les faux prix sont, avec l'euro et le système politique français, la principale cause de la désindustrialisation française.
Cette situation est le résultat d'une volonté politique. L'Union latine voulue par Napoléon III (1808-1873) ; la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), organisation internationale fondée sur le traité de Paris (1951-1952) ; le traité de Rome, ou traité instituant la Communauté économique européenne (1957) ; l'Unité de compte agricole (1962) ; l'ECU, ou European Currency Unit, du SME, ou Système monétaire européen (1979) ; l'Union européenne (1993) : ces étapes ont été autant de changements qui ont mené à l'euro (1999-2002), dont la première victime a été l'Italie, sa production industrielle s'étant effondrée de 40 %. Malgré les preuves de l'échec, Jacques Delors, qui en était conscient, faisait partie des acharnés, voulant construire un État européen avec les débris des nations. Mais il n'y a pas de nationalité européenne. Nous sommes Français.
Nous n'avons pas à être partisans d'une Europe qui détruit les nations. Une Europe à même de servir les intérêts de la France serait une Europe des convergences privilégiant la subsidiarité, dans la prise en compte des différences entre les nations. C'était le cas de l'Europe entre le Moyen Âge et le début du vingtième siècle, une Europe dynamique où les mécanismes de régulation darwiniens favorisaient ce que l'on appelle aujourd'hui l'antifragilité. Jacques Delors, Jacques Attali et consorts, dans leur volonté aveugle de recréer l'équivalent d'un empire romain dont ils tireraient les ficelles, ne comprennent pas ou feignent de ne pas comprendre que, plus un système se hiérarchise, plus il se fragilise : s'il n'y a que cinq banques, quand trois des cinq sautent c'est toute l'économie qui s'écroule alors que, quand il y a cinq cents banques et que trente sautent, le système se maintient et se renforce.
C'est, par ailleurs, tout le problème de la gauche dans son approche de la diversité, approche qui relève du déni, car d'une incohérence insurmontable et, qui plus est, psychopathologique relevant de l'hystérie, entre une volonté (affirmée) de défense et l'exercice (factuel) d'une censure visant l'alignement par l'homogénéisation la plus simpliste, la plus réductrice. Ce commentaire est de moi, rejoignant l'analyse de Gave, à la différence que lui ne se réclame pas de l'extrême droite, alors que je revendique cette appellation. Dans un cas comme dans l'autre, il est toutefois intéressant de constater que les inconséquences de la gauche sont évidentes, et que toutes les mesures politiques et économiques inefficaces qui ont entraîné le déclin du monde occidental en sont imprégnées.
Au début de l'euro, Attali avait dit que cette monnaie unique allait amener une convergence des économies, ainsi qu'une croissance décuplée. Or, les économies européennes n'ont jamais été aussi faibles, et il n'y a aucune convergence. Pourquoi cet échec des convergences ? Des transferts massifs ont été faits à crédit : le maintien de l'Espagne, de l'Italie et de la Grèce impliquait d'énormes besoins en liquidités. Comme l'Allemagne était plus efficace que les autres pays, les Allemands avaient des excédents extérieurs et vendaient plus à l'étranger, recevant, en paiement, des obligations des pays concernés. De ce fait, tous les trois ou quatre ans, les comptes se remettaient à l'équilibre.
En 2023, cette remise à l'équilibre des comptes ne se fait plus, car l'Allemagne ne reçoit plus aucun paiement. Les systèmes de paiement TARGET et TARGET 2 se sont avérés dysfonctionnels car se bornant à écrire, dans les comptes de l'Espagne, que cette dernière a un déficit vis-à-vis de l'Allemagne, ce qui veut dire qu'il n'y a plus d'ajustement de marché du fait que les taux de change ne varient plus, et que l'évolution de la compétitivité des pays n'est plus prise en considération. Ce sont des systèmes qui favorisent une montée de la dette à l'infini.
Autre aspect significatif : avant l'euro, la production industrielle des pays européens suivait plus ou moins la même courbe ascendante ; depuis le passage à l'euro, l'écart se creuse entre l'Allemagne et des pays comme l'Espagne ou l'Italie, laquelle a perdu, en vingt ans, 70 % de sa productivité industrielle. Au lieu de l'ajustement naturel des taux de change et des taux d'intérêt par lequel les marchés trouvaient un niveau d'équilibre, tout a été bloqué : à la place, les variables d'ajustement sont devenues les profits des entreprises, l'emploi et les déficits budgétaires. D'où l'explosion des déficits budgétaires de pays tels que la France. Dans une trappe à dettes, on est condamné à payer plus que l'on ne gagne (parce que le taux d'intérêt est supérieur au taux de croissance).
Des phénomènes mondiaux vont provoquer une hausse des taux d'intérêt, ce que l'Europe ne pourra pas supporter. Avec les matières premières russes qui vont vers le sous-continent indien, un immense arc de développement est en train de se former, englobant la Russie, la Turquie, la Syrie, le Liban, l'Arabie Saoudite, l'Iraq, l'Iran, le Pakistan et l'Inde. Au début des années 2000, les pays asiatiques faisaient faillite : c'était la crise asiatique. Depuis, les responsables de ces pays se sont dit qu'ils ne voudraient plus revivre une situation de déficit extérieur, qui les obligerait vis-à-vis du FMI.
Pour atteindre leur objectif, ils ont recouru à la sous-évaluation de leur monnaie et privilégié la vente, ce qui leur a permis de faire d'importantes réserves de change et d'acheter des obligations aux États-Unis et en Europe. Vingt ans après, ils possèdent plus de 5000 milliards de dollars dans nos marchés obligataires. Avec l'argent qu'ils ont, ils peuvent à présent investir dans l'immense arc de développement qui va de la Russie jusqu'à l'Inde, liquidant nos obligations.
La situation est comparable à ce qui s'était passé au moment de la réunification de l'Allemagne : face à la nécessité de reconstruire l'Allemagne de l'est, tous les excédents d'épargne de l'Allemagne de l'ouest à l'étranger avaient été rappelés, d'où, entre 1991 et 1993, une montée des taux d'intérêt et une chute du marché des actions dans le monde entier. Si aujourd'hui nos taux d'intérêt sont proches de 0, demain ils seront à 4 ou à 6, parce que c'est le rapport entre l'offre et la demande d'épargne dans le monde, lié au fait que les asiatiques préfèreront investir en Turquie plutôt qu'en Europe, et que nos obligations seront converties en liquidités.
La hausse des taux d'intérêt s'annonce inéluctable, la rentabilité du capital investi venant d'augmenter brutalement dans le monde, en raison du lien qui s'est créé entre la Russie et l'océan Indien, conséquence de la guerre ukrainienne. Aujourd'hui, Beyrouth permet d'investir dans l'immobilier à bas prix. En Europe, on va assister à un gigantesque transfert de richesses depuis les rentiers vers les producteurs. Il faut donc vendre ses obligations françaises et acheter des actions dans des industries françaises qui, bien que n'ayant pas d'usine en France, sont performantes (comme, par exemple, Air Liquide).
Les politiques économiques européennes ont créé un monstre bureaucratique empêchant notre croissance. Nous entrons de nouveau dans un monde de forte croissance auquel nous ne sommes pas préparés, à cause de l'état actuel de nos institutions et de nos marchés. Nous avons, sous le coup des mesures contreproductives qui ont été imposées à nos pays, perdu notre flexibilité ainsi que notre compétitivité mondiales, au point où nous nous retrouvons, en 2023, dans une situation comparable à celle de l'Union soviétique avant sa chute.
Que se passerait-il si l'euro disparaissait, ce qui semble probable ? Contrairement à ce qui se serait produit quinze ans en arrière, la France ne s'en sortirait pas plus mal que l'Allemagne, en proie au vieillissement démographique, à sa perte de domination sur le marché mondial de l'automobile, à la fermeture de ses centrales nucléaires, et à ses mauvaises relations avec la Russie (l'empêchant d'accéder à des matières premières). Les effets les plus coûteux d'une sortie de l'euro, pour les consommateurs européens, concerneraient principalement les produits de haute technologie importés d'Asie, dont le prix doublerait, et les Français n'iraient plus passer leurs vacances en Thaïlande. Une autre conséquence du changement serait la disparition d'un certain nombre d'emplois administratifs.
Une sortie de l'euro provoquerait aussi une crise inflationniste, le temps pour une banque centrale de procéder aux réajustements nécessaires. En fait, on assiste à l'éclatement de la tentative d'instauration d'une superclasse mondiale, et des organisations désormais inutiles comme l'ONU ou l'OTAN sont vouées à disparaître. Il y aura beaucoup à gagner mais il faudra réagir vite, ce qui implique une flexibilité suffisante, et donc d'éviter les contrats d'assurance-vie ainsi que les obligations d'État.
Le fait que le monde redevienne chaotique est une bonne nouvelle en soi, car les marchés auront ainsi une plus grande marge de manœuvre. Pour autant, une sortie de l'euro ne dispense pas de réformer structurellement les dépenses de l'État. Les partis politiques français qui, en 2023, sont favorables à une sortie de l'euro n'envisagent pas forcément de remettre en cause la façon dont l'économie française est gérée, pourtant nous avons vu que c'est la condition sine qua non de la réussite d'une sortie de l'euro.
De plus, si l'euro disparaît, la construction européenne telle que nous la connaissons disparaîtra aussi, car l'euro, en tant que monnaie commune, est l'élément-clé de l'Union européenne (UE). Le problème est que, la subsidiarité ayant été mise à mal, il sera difficile de faire le point pour garder les aspects efficaces de l'ancienne construction de façon à écarter les aspects qui auront mené à sa chute, même si c'est ce qu'il faudrait faire en théorie. Par ailleurs, en cas de sortie de l'euro, le principe connu sous le nom de lex monetae dispose qu'un État souverain peut décider d'émettre sa propre monnaie. Par exemple, notre dette sera labélisée en francs français. Le franc pourrait, à terme, valoir plus que l'euro.
Une analyse des monnaies est toujours difficile et risquée (car liée à des flux et des stocks dans des pays différents, avec des attitudes différentes et des droits différents), mais aujourd'hui on peut prendre le risque de dire que la rentabilité du capital investi va exploser dans une partie importante du monde. Dans les dix années qui viennent, les jeunes compétents et bien formés viendront tous des pays de l'océan Indien. Quant aux pays dont les monnaies étaient enfermées dans des carcans administratifs, ils connaîtront des problèmes. Ce sera, entre autres, le cas de la France.
Rappelons que, depuis qu'Emmanuel Macron est aux affaires (incluant la manière dont la crise du Covid-19 a été gérée), la dette de la France a augmenté de 700 milliards d'euros, sans aucun bénéfice. Y a-t-il eu, en effet, des améliorations dans les hôpitaux, dans notre système éducatif ? Non. Le coût d'une sortie de l'euro peut être, pour la France, évalué à 20 milliards, ce qui serait peu en comparaison de la montée de la dette sous Macron, d'autant plus que ces 20 milliards seraient employés au retour de notre souveraineté, qui permettrait de nouveau aux entrepreneurs français de bâtir des usines en France.
Le but de cet entretien est d'expliquer en quoi le retour à une monnaie nationale serait bienvenu, et qu'il faut en finir, par ailleurs, avec l'idée ancestrale d'une monnaie forte comme soi-disant nécessité : une monnaie n'a pas à être forte ou faible, mais à se maintenir, comme les taux d'intérêt, à son niveau naturel, celui de la productivité intérieure. Le niveau d'une monnaie est un prix comme un autre ; à vouloir modifier un prix, il faut toujours s'attendre à un désastre, d'autant plus que la volonté de s'arrimer au deutschemark était artificielle.
Avant, quand les socialistes faisaient des erreurs (ce qu'ils font tout le temps), ils se heurtaient au mur de l'argent : la France chutait, les taux d'intérêt montaient et tout le monde s'en allait, mais il fallait que quelqu'un revienne mettre de l'ordre. Depuis l'euro, la classe politique française accumule les erreurs (comme la fermeture des centrales nucléaires, ou le fait que la production industrielle ne représente plus que 9 % de l'économie française). Il faut reprendre les bases de la monnaie (intermédiaire d'échange, réserve de valeur et unité de stock), et rappeler à quoi servent les taux de change et les taux d'intérêt.
La monnaie, c'est un prix. Concernant les taux de change, ce prix qu'est la monnaie doit s'exercer dans la géographie, pour correspondre aux flux des capitaux et aux atouts de la France tels que perçus par les étrangers ainsi que par les Français eux-mêmes. Concernant les taux d'intérêt, la monnaie doit s'exercer dans le temps, les taux d'intérêt servant précisément à mesurer le risque du temps. Un euro que l'on doit toucher dans dix ans n'a pas la même valeur qu'un euro d'aujourd'hui : si les taux d'intérêt sont à 7 et que l'on met 0,50 euro aujourd'hui, on touchera 1 euro dans dix ans. Un euro à percevoir dans dix ans vaut donc la moitié d'un euro d'aujourd'hui.
C'est ce que l'on appelle mesurer le risque du temps, notion importante pour le capitalisme car permettant, dans le cas d'un emprunt, de faire des calculs pour savoir quand les recettes escomptées, à l'horizon des dix prochaines années, vont être supérieures aux taux d'intérêt que l'on va devoir payer. C'est une façon de mesurer les comptes, entre le cash-flow que l'on va recevoir et celui que l'on va devoir payer. D'où le non-sens des taux négatifs de Mario Draghi à l'époque de leur mise en place : les taux d'intérêt servant à compenser l'incertitude du futur, des taux d'intérêt négatifs reviennent à dire que le futur serait plus certain que le présent.
Les taux d'intérêt négatifs, qui concernent globalement la période allant de 2012 à 2020, ont mis à mal toute notre économie, empêchant les compagnies d'assurances et les banques de travailler, le cours de ces dernières étant passé de 700 à 100, obligeant les actionnaires des banques à payer un maximum. Les politiques se croient plus malins que le marché mais, en essayant de contrôler les taux de change et les taux d'intérêt, ne font que déformer le système économique. L'économie espagnole et l'économie allemande n'ayant pas la même force, il est logique que ces pays aient des monnaies différentes pour montrer leurs différences économiques. Aligner deux pays sur la même monnaie crée une relation de dépendance inutile et nuisible, obligeant toujours les uns à payer pour les autres.
La production industrielle en France, passée de 24 % à 9 %, s'est effondrée. Nous avons toujours des entreprises industrielles françaises performantes, mais elles ne produisent plus localement. Par exemple, Air Liquide a des usines partout sauf en France : dans le cas contraire, Air Liquide ne gagnerait pas d'argent en France, à cause des manipulations politiques des taux de change et des taux d'intérêt. Les faux prix sont, avec l'euro et le système politique français, la principale cause de la désindustrialisation française.
Cette situation est le résultat d'une volonté politique. L'Union latine voulue par Napoléon III (1808-1873) ; la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), organisation internationale fondée sur le traité de Paris (1951-1952) ; le traité de Rome, ou traité instituant la Communauté économique européenne (1957) ; l'Unité de compte agricole (1962) ; l'ECU, ou European Currency Unit, du SME, ou Système monétaire européen (1979) ; l'Union européenne (1993) : ces étapes ont été autant de changements qui ont mené à l'euro (1999-2002), dont la première victime a été l'Italie, sa production industrielle s'étant effondrée de 40 %. Malgré les preuves de l'échec, Jacques Delors, qui en était conscient, faisait partie des acharnés, voulant construire un État européen avec les débris des nations. Mais il n'y a pas de nationalité européenne. Nous sommes Français.
Nous n'avons pas à être partisans d'une Europe qui détruit les nations. Une Europe à même de servir les intérêts de la France serait une Europe des convergences privilégiant la subsidiarité, dans la prise en compte des différences entre les nations. C'était le cas de l'Europe entre le Moyen Âge et le début du vingtième siècle, une Europe dynamique où les mécanismes de régulation darwiniens favorisaient ce que l'on appelle aujourd'hui l'antifragilité. Jacques Delors, Jacques Attali et consorts, dans leur volonté aveugle de recréer l'équivalent d'un empire romain dont ils tireraient les ficelles, ne comprennent pas ou feignent de ne pas comprendre que, plus un système se hiérarchise, plus il se fragilise : s'il n'y a que cinq banques, quand trois des cinq sautent c'est toute l'économie qui s'écroule alors que, quand il y a cinq cents banques et que trente sautent, le système se maintient et se renforce.
C'est, par ailleurs, tout le problème de la gauche dans son approche de la diversité, approche qui relève du déni, car d'une incohérence insurmontable et, qui plus est, psychopathologique relevant de l'hystérie, entre une volonté (affirmée) de défense et l'exercice (factuel) d'une censure visant l'alignement par l'homogénéisation la plus simpliste, la plus réductrice. Ce commentaire est de moi, rejoignant l'analyse de Gave, à la différence que lui ne se réclame pas de l'extrême droite, alors que je revendique cette appellation. Dans un cas comme dans l'autre, il est toutefois intéressant de constater que les inconséquences de la gauche sont évidentes, et que toutes les mesures politiques et économiques inefficaces qui ont entraîné le déclin du monde occidental en sont imprégnées.
Au début de l'euro, Attali avait dit que cette monnaie unique allait amener une convergence des économies, ainsi qu'une croissance décuplée. Or, les économies européennes n'ont jamais été aussi faibles, et il n'y a aucune convergence. Pourquoi cet échec des convergences ? Des transferts massifs ont été faits à crédit : le maintien de l'Espagne, de l'Italie et de la Grèce impliquait d'énormes besoins en liquidités. Comme l'Allemagne était plus efficace que les autres pays, les Allemands avaient des excédents extérieurs et vendaient plus à l'étranger, recevant, en paiement, des obligations des pays concernés. De ce fait, tous les trois ou quatre ans, les comptes se remettaient à l'équilibre.
En 2023, cette remise à l'équilibre des comptes ne se fait plus, car l'Allemagne ne reçoit plus aucun paiement. Les systèmes de paiement TARGET et TARGET 2 se sont avérés dysfonctionnels car se bornant à écrire, dans les comptes de l'Espagne, que cette dernière a un déficit vis-à-vis de l'Allemagne, ce qui veut dire qu'il n'y a plus d'ajustement de marché du fait que les taux de change ne varient plus, et que l'évolution de la compétitivité des pays n'est plus prise en considération. Ce sont des systèmes qui favorisent une montée de la dette à l'infini.
Autre aspect significatif : avant l'euro, la production industrielle des pays européens suivait plus ou moins la même courbe ascendante ; depuis le passage à l'euro, l'écart se creuse entre l'Allemagne et des pays comme l'Espagne ou l'Italie, laquelle a perdu, en vingt ans, 70 % de sa productivité industrielle. Au lieu de l'ajustement naturel des taux de change et des taux d'intérêt par lequel les marchés trouvaient un niveau d'équilibre, tout a été bloqué : à la place, les variables d'ajustement sont devenues les profits des entreprises, l'emploi et les déficits budgétaires. D'où l'explosion des déficits budgétaires de pays tels que la France. Dans une trappe à dettes, on est condamné à payer plus que l'on ne gagne (parce que le taux d'intérêt est supérieur au taux de croissance).
Des phénomènes mondiaux vont provoquer une hausse des taux d'intérêt, ce que l'Europe ne pourra pas supporter. Avec les matières premières russes qui vont vers le sous-continent indien, un immense arc de développement est en train de se former, englobant la Russie, la Turquie, la Syrie, le Liban, l'Arabie Saoudite, l'Iraq, l'Iran, le Pakistan et l'Inde. Au début des années 2000, les pays asiatiques faisaient faillite : c'était la crise asiatique. Depuis, les responsables de ces pays se sont dit qu'ils ne voudraient plus revivre une situation de déficit extérieur, qui les obligerait vis-à-vis du FMI.
Pour atteindre leur objectif, ils ont recouru à la sous-évaluation de leur monnaie et privilégié la vente, ce qui leur a permis de faire d'importantes réserves de change et d'acheter des obligations aux États-Unis et en Europe. Vingt ans après, ils possèdent plus de 5000 milliards de dollars dans nos marchés obligataires. Avec l'argent qu'ils ont, ils peuvent à présent investir dans l'immense arc de développement qui va de la Russie jusqu'à l'Inde, liquidant nos obligations.
La situation est comparable à ce qui s'était passé au moment de la réunification de l'Allemagne : face à la nécessité de reconstruire l'Allemagne de l'est, tous les excédents d'épargne de l'Allemagne de l'ouest à l'étranger avaient été rappelés, d'où, entre 1991 et 1993, une montée des taux d'intérêt et une chute du marché des actions dans le monde entier. Si aujourd'hui nos taux d'intérêt sont proches de 0, demain ils seront à 4 ou à 6, parce que c'est le rapport entre l'offre et la demande d'épargne dans le monde, lié au fait que les asiatiques préfèreront investir en Turquie plutôt qu'en Europe, et que nos obligations seront converties en liquidités.
La hausse des taux d'intérêt s'annonce inéluctable, la rentabilité du capital investi venant d'augmenter brutalement dans le monde, en raison du lien qui s'est créé entre la Russie et l'océan Indien, conséquence de la guerre ukrainienne. Aujourd'hui, Beyrouth permet d'investir dans l'immobilier à bas prix. En Europe, on va assister à un gigantesque transfert de richesses depuis les rentiers vers les producteurs. Il faut donc vendre ses obligations françaises et acheter des actions dans des industries françaises qui, bien que n'ayant pas d'usine en France, sont performantes (comme, par exemple, Air Liquide).
Les politiques économiques européennes ont créé un monstre bureaucratique empêchant notre croissance. Nous entrons de nouveau dans un monde de forte croissance auquel nous ne sommes pas préparés, à cause de l'état actuel de nos institutions et de nos marchés. Nous avons, sous le coup des mesures contreproductives qui ont été imposées à nos pays, perdu notre flexibilité ainsi que notre compétitivité mondiales, au point où nous nous retrouvons, en 2023, dans une situation comparable à celle de l'Union soviétique avant sa chute.
Que se passerait-il si l'euro disparaissait, ce qui semble probable ? Contrairement à ce qui se serait produit quinze ans en arrière, la France ne s'en sortirait pas plus mal que l'Allemagne, en proie au vieillissement démographique, à sa perte de domination sur le marché mondial de l'automobile, à la fermeture de ses centrales nucléaires, et à ses mauvaises relations avec la Russie (l'empêchant d'accéder à des matières premières). Les effets les plus coûteux d'une sortie de l'euro, pour les consommateurs européens, concerneraient principalement les produits de haute technologie importés d'Asie, dont le prix doublerait, et les Français n'iraient plus passer leurs vacances en Thaïlande. Une autre conséquence du changement serait la disparition d'un certain nombre d'emplois administratifs.
Une sortie de l'euro provoquerait aussi une crise inflationniste, le temps pour une banque centrale de procéder aux réajustements nécessaires. En fait, on assiste à l'éclatement de la tentative d'instauration d'une superclasse mondiale, et des organisations désormais inutiles comme l'ONU ou l'OTAN sont vouées à disparaître. Il y aura beaucoup à gagner mais il faudra réagir vite, ce qui implique une flexibilité suffisante, et donc d'éviter les contrats d'assurance-vie ainsi que les obligations d'État.
Le fait que le monde redevienne chaotique est une bonne nouvelle en soi, car les marchés auront ainsi une plus grande marge de manœuvre. Pour autant, une sortie de l'euro ne dispense pas de réformer structurellement les dépenses de l'État. Les partis politiques français qui, en 2023, sont favorables à une sortie de l'euro n'envisagent pas forcément de remettre en cause la façon dont l'économie française est gérée, pourtant nous avons vu que c'est la condition sine qua non de la réussite d'une sortie de l'euro.
De plus, si l'euro disparaît, la construction européenne telle que nous la connaissons disparaîtra aussi, car l'euro, en tant que monnaie commune, est l'élément-clé de l'Union européenne (UE). Le problème est que, la subsidiarité ayant été mise à mal, il sera difficile de faire le point pour garder les aspects efficaces de l'ancienne construction de façon à écarter les aspects qui auront mené à sa chute, même si c'est ce qu'il faudrait faire en théorie. Par ailleurs, en cas de sortie de l'euro, le principe connu sous le nom de lex monetae dispose qu'un État souverain peut décider d'émettre sa propre monnaie. Par exemple, notre dette sera labélisée en francs français. Le franc pourrait, à terme, valoir plus que l'euro.
Une analyse des monnaies est toujours difficile et risquée (car liée à des flux et des stocks dans des pays différents, avec des attitudes différentes et des droits différents), mais aujourd'hui on peut prendre le risque de dire que la rentabilité du capital investi va exploser dans une partie importante du monde. Dans les dix années qui viennent, les jeunes compétents et bien formés viendront tous des pays de l'océan Indien. Quant aux pays dont les monnaies étaient enfermées dans des carcans administratifs, ils connaîtront des problèmes. Ce sera, entre autres, le cas de la France.
Rappelons que, depuis qu'Emmanuel Macron est aux affaires (incluant la manière dont la crise du Covid-19 a été gérée), la dette de la France a augmenté de 700 milliards d'euros, sans aucun bénéfice. Y a-t-il eu, en effet, des améliorations dans les hôpitaux, dans notre système éducatif ? Non. Le coût d'une sortie de l'euro peut être, pour la France, évalué à 20 milliards, ce qui serait peu en comparaison de la montée de la dette sous Macron, d'autant plus que ces 20 milliards seraient employés au retour de notre souveraineté, qui permettrait de nouveau aux entrepreneurs français de bâtir des usines en France.